Groove Menu Midi Mode Remix 6:49
Groove Menu Midi Mode 5:26
Not Everybody Dance Now 4:27

Everybody Dance Now (texte, 2,6 Mo)

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Références
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EVERY BODY DANCE NOW

Travail théorique réalisé dans le cadre du master Critical Curatorial Cybermedia (HEAD, Genève), comprend un essai et un vinyle.

(Extrait)
GONNA MAKE YOU SWEAT
La fête est partout. Dans la pub. La pub est partout. Dans la fête. En 1989, C&C Music Factory, un groupe de deux producteurs de dance music plutôt commerciale, sort son premier album «Gonna Make You Sweat», dont le single éponyme «Gonna Make You Sweat» se reconnaît aisément aujourd’hui encore à son cri de guerre: «everybody dance now !». Presque 20 ans plus tard, la fête s’impose comme une obligation marketing. Les djs ont envahi la pub. Dans sa dernière campagne, même l’eau d’Evian fait lever les bras en rythme à un groupe de jeunes fêtards motivés: avaler de l’eau d’Evian équivaut à avaler une boîte à rythmes. Exercice de style délicat, puisque c’est rarement en buvant de l’eau qu’on fait la fête, même si, comme aime à nous le rappeler Mister Cocktail, «sans alcool la fête est plus folle».

(Move) everybody dance now
Everybody dance now

Pause take a breath and go for yours on my command
Now hit the dance floor it's gonna make you sweat till you bleed
Is that dope enough indeed I paid the price to control the dice
I'm more precise to the point I'm nice
Let the music take control of your heart and soul
Unfold your body is free and behold
Dance till you can't dance till you can't dance no more
Get on the floor and get ablow
Then come back and upside down easy now
Let me see you move left to right groove
Work me all night

The music is my life
Everybody dance now (x3)
Everybody

Come on let's sweat (sweat sweat) baby
Let the music take control (control control)
Let the rhythm move you
Sweat (sweat sweat) sweat
Let the music take your soul (soul soul)
Let the rhythm move you

Permettez-moi de vous rassurer, vous ne danserez que si vous en avez envie.
Une nécessité s’impose: définir la fête, ou plutôt dessiner les contours de pratiques festives somme toute très différentes. Il y a la fête que je définirai comme rituelle-traditionnelle et la fête ou «party» urbaine contemporaine centrée autour de mouvements musicaux liés aux cultures alternatives (ou contre-cultures).

Pourquoi la fête. Évidemment, la logique de récupération n’est pas nouvelle, elle est même la condition de renouvellement et d’évolution du marché, elle est très largement décrite et décriée par quiconque possède une once de sens critique.
Premier obstacle: ne pas recommencer une longue attaque aussi belliqueuse que descriptive de ce qui appartient au domaine de l’inéluctable.
Deuxième obstacle: ne pas tomber dans la nostalgie d’un discours type «ah, avant au moins on savait faire des vraies fêtes, maintenant tout est pourri, tout est commercial». D’ailleurs, pour être bonne joueuse je serai bien obligée de reconnaître que les gens n’ont pas l’air de moins s’amuser depuis que le zinc du bar est tapissé de taureaux red-bull. La fête n’appartient à personne, je serais bien empruntée de séparer la «vraie» fête de la «fausse», la «mauvaise» de la «bonne».

Donc pourquoi la fête ? Parce que le langage marketing est un outil qui «oublie» de spécifier ses intentions (On vous vendra toujours de l’Evian en vous disant que ça met de bonne humeur, que c’est détoxifiant et que ça vient directement du centre de la terre. Est-ce qu’ils vont oser, une fois nous suggérer d’acheter de l’Evian pour leur permettre de s’en mettre plein les fouilles ?), et parce que la récupération raconte bien des choses sur celui qui récupère, ce qui, dans le cadre d’un échange dont les termes sont plus qu’ambigus, peut s’avérer fort utile. La fête, en tant qu’objet spécifique de récupération, met en lumière des logiques spécifiques de récupération.
Parce que la fête est une pratique. C’est ma pratique de dj. Il était temps que je me pose la question du sens de cette pratique. Bien sûr, le marché a investi les pratiques festives contemporaines comme support marketing de produits. Bien sûr, l’industrie festive, l’événementiel a produit des objets festifs de grande consommation dont le public n’est plus acteur. Bien sûr l’industrie a utilisé la fête pour mettre les corps en concurrence et apposer un label d’excellence et d’exclusivité sur des biens de consommation produits à des échelles qui donnent le tournis.

Reste que la fête an tant qu’événement social, spontané ou pas, traditionnel, rituel ou pas ouvre une brèche dans l’ordre établi en s’opposant à l’évidence qu’est l’impératif de capitalisation. Reste que même au Macumba-la-plusgrande-discothèque-du-monde il se passe des choses entre des gens, de la séduction, de la danse, des comportements, conscients ou pas, de transgression des codes sociaux, quelque chose qui n’est pas leur addition d’obligations vitales de tous les jours. Reste qu’en allant danser et se saouler la gueule les gens annihilent des richesses et de l’énergie de travail, s’octroient un vide de productivité et, symboliquement au moins, se jouent des dogmes économiques qui, paraît-il, sont inébranlables ?